« 25 novembre 1988. Courreaux de Groix. La mer enfumée. 4 heures du matin. Vents de suet qui drapent d'une brume opaque et givrante le halo des projecteurs du pont. Brume-poche les yeux troublés par ce froid livide et les échos verts qui sautillent sur l'écran embué du radar. »
Alain Jégou, Comme du vivant d'écume, éditions La Digitale, 1995.
C'est après avoir lu Passe Ouest (éditions Apogée, 2007), livre dans lequel Alain Jégou retrace, à coups de séquences vives et houleuses, ce que fut son quotidien de marin-pêcheur durant près de trente ans, que le réalisateur Christophe Rey a décidé de consacrer un film à celui qui venait de l'embarquer ainsi, sans préambule, à bord de l'Ikaria, chalutier de neuf mètres cinquante immatriculé à Lorient et habitué à creuser sa route chaque jour, bien avant l'aube, dans la nuit noire, quelque part au large de l'île de Groix et du phare de Pen Men. Son sens aigu de l'observation nous permet d'entrer discrètement dans l'univers très particulier d'un homme qui a réussi à bâtir, parallèlement à son rude métier, une œuvre poétique inclassable où l'océan (sa force, sa hargne, ses sautes d'humeur) reste maître du jeu.
Son film, Le chant des mers (Candela Productions), sera projeté en sa présence lors de la soirée consacrée à l'écrivain et au poète, décédé le 6 mai 2013. Il sera accompagné par Jean Azarel, coauteur – avec Alain Jégou et Lucien Suel du livre Papy Beat Generation – et auteur récemment de Love is everywhere (éditions Gros textes) et par Benoît Delaune, musicien et auteur, qui a préparé, présenté et annoté Direct Live, un livre inédit d'Alain Jégou, à paraître début 2015 aux éditions Apogée. |